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Xavi, le candidat idéal ?

Alors que le FC Barcelone cherche un technicien pour succéder à Ronald Koeman, tous les yeux sont rivés sur Xavi. L’ancien joueur du Barça, qui entraîne aujourd’hui le club qatari d’Al-Sadd, est pressenti pour le poste : idylle blaugrana ou choix précipité ?

Xavi Hernandez est l'entraîneur d'Al-Sadd depuis le 28 mai 2019 cf Todo Noticias

Le 19 août 2020, le FC Barcelone présente son nouvel entraîneur : Ronald Koeman. Une décision saluée par les socios, ravis de voir une légende du club prendre la tête du Barça. Le néerlandais a le CV parfait : expérimenté, respecté, amoureux de l’institution. Comment ne pas être séduit ? 14 mois plus tard, le schéma est tout autre. L’ancienne gloire est licenciée pour mauvais résultats, subissant le même sort que ses deux prédécesseurs : Quique Setién et Ernesto Valverde. 

 

9ème du championnat et mal embarqué en C1, Koeman laisse le Barça en plus mauvais état qu’il ne l’a récupéré, ce qui n'est pas une mince affaire : mais est-ce vraiment sa faute ? La question a le mérite d’être posée tant les problèmes blaugranas sont profonds. Sans Lionel Messi, le FC Barcelone commence une nouvelle ère: Xavi Hernandez peut-il faire changer les choses ? 

 

Tiki-taka, toujours d’actualité ? 

 

Xavi, Busquets, Iniesta : une décennie durant, ce milieu a ridiculisé ses concurrents. Leur secret ? Le tiki-taka. Un style de jeu prônant la possession, le jeu de passes et la qualité technique. Si cette recette a permis d'amener le Barça de Guardiola au sommet, elle ne semble plus d’actualité. Ces dernières années, le football s’est musclé … plus physique, plus rapide, plus tueur : l’efficacité est devenue le maître-mot. 

Gérard Piqué, Frenkie De Jong et Sergio Busquets dépités après la défaite 8-2 du Barça contre le Bayern en 2020  

Si le football change, l’ADN du FC Barcelone et de la Masia (son centre de formation) reste le même : Xavi en est l’exemple parfait. Arrivé au Qatar en tant qu’entraîneur en 2019, il a tout de suite imposé sa patte : un jeu de possession, basé sur le mouvement et les prises d’espaces. En bref : un tiki-taka remodelé. En 76 matchs à la tête de l’équipe, Xavi compte 48 victoires et 5 titres dont un championnat et une coupe nationale. Un bilan honorable pour une première expérience. 

 

On peut en déduire que, si jamais Xavi prend en main le Barça, il tentera de reproduire cette recette. D’autant que l’espagnol a les joueurs pour le faire : Pedri, Riqui Puig, Ansu Fati, Frenkie De Jong, Gavi … La future génération barcelonaise fait rêver ! Toutefois, même doté de si bons éléments, difficile d'imaginer un retour du tiki-taka au premier plan. 

 

Car si ce mode de jeu vise autant à étouffer qu’à fatiguer l’adversaire, les standards ont changé. Aujourd’hui, l’intensité physique et l’efficacité des “pressings” sont tout autres, faire courir l'adversaire n’est plus la solution. Au contraire. Il n’y a qu’à prendre les trois derniers vainqueurs de la LDC pour s’en rendre compte : Chelsea, le Bayern et Liverpool. Trois machines bien huilées, brillant moins par leurs qualités individuelles que par leur organisation collective excellente. Résultat ? 4-0 et 8-2. 

 

Un retour au bon moment ? 

 

Le défi est donc triple pour Xavi : remettre au jour une tactique démodée, relever un club blessé et bâtir un effectif performant. Cette mission, il l’attend depuis longtemps. L’année dernière, il annonçait déjà : “mon objectif et mon rêve sont d’entraîner le Barça.” 

Pour autant, est-il préparé ? Nombreux sont ceux à s’être cassé les dents en revenant en sauveur dans leurs clubs de cœur. Derniers exemples en date ? Andrea Pirlo à la Juventus, Thierry Henry à Monaco et Frank Lampard à Chelsea … Pas très rassurants. D’autant que le parcours de l’anglais à Derby County avait été une réussite. Le cas Lampard prouve qu’il ne faut pas se précipiter. Pep Guardiola avait voyagé et étudié le monde du football pendant des années avant d’aller à Barcelone : Xavi n’a qu’une expérience de deux ans au Qatar. 

Lampard, Xavi, Pirlo, trois légendes pour un rêve : entraîner leur club de coeur cf latribuna

D’autant que le coach d’Al-Sadd débarque avec des attentes énormes. Endosser le rôle de sauveur si tôt est risqué sinon suicidaire, seul Zizou a fait un sans-faute. Il faut également prendre en compte que le français n’est pas arrivé dans un club aussi décimé. Xavi va devoir opérer avec un effectif incomplet, des finances catastrophiques et des supporters désespérés. Mais si tout porte à croire qu’il est trop tôt pour un retour, le football n’est pas toujours rationnel. 

 

Un sauveur sinon rien 

 

Quand on regarde la liste des prétendants pour le poste, les noms ne sont pas très “sexys” : Andrea Pirlo, Marcelo Gallardo (River Plate), Roberto Martinez (Belgique) … Seul Erik Ten Hag (Ajax) fait figure de candidat idéal. Le FC Barcelone n’a pas des milliers de choix et Xavi est le plus cohérent. Malgré toutes les raisons énoncées auparavant, il faut reconnaître que le champion du monde a le profil idéal pour ce Barça. Car avant de conquérir l’Europe, le FC Barcelone doit reconquérir le cœur de ses supporters. 

 

Lionel Messi envolé, le Camp Nou a perdu son magicien. A défaut d’en avoir un sur la pelouse, il en faut un sur le banc pour remplir le stade. Le 20 octobre, lors de la victoire 1-0 face au Dynamo Kiev, ils étaient seulement 46 000 dans les tribunes (le Camp Nou peut accueillir près de 100 000 spectateurs). En ces temps de crise, la billetterie est une ressource non-négligeable et Xavi est l’atout séduction rêvé : quoi de plus excitant que le retour de l’enfant du club !  

 

La mission reconquête se fait aussi dans le vestiaire et celui des catalans est un sacré dilemme. Piliers indéboulonnables, jeunes pépites, joueurs perdus, éternels espoirs … il y a de tout dans l’effectif blaugranas. Ré-organiser tout cela n'est pas une mince affaire, d’autant que le vestiaire barcelonais ne manque pas d’égo. En ce sens, Xavi a le profil parfait pour tout remettre en ordre. Il connaît les piliers comme Piqué ou Alba, inspire le respect aux nouveaux venus (Depay, Agüero) et est un exemple pour la jeune génération.

 

En dehors de tous ces facteurs, on ne peut nier que le FC Barcelone est un club rempli d’histoire, de valeurs, de principes. Bafouée ces dernières années par une gestion catastrophique et des recrutements hasardeux, l’institution doit revenir à ses fondements. Sur et en dehors du terrain. Le Barça doit retrouver ce qui a jadis fait sa force : le tiki-taka et la MASIA. Et cela, quoi qu’il en coûte. Si le CV de Xavi n’est pas parfait, son image l’est, ce qui fait de lui un choix nécessaire. "Més que un club” : le FC Barcelone doit revenir à ses principes, car il n’a jamais été meilleur qu’en respectant sa philosophie. 

 

Louis Bouchard